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Les réseaux sociaux favorisent de plus en plus le body shaming auquel font face longtemps les femmes. Si celles-ci en sont les principales victimes, elles contribuent pourtant beaucoup à propager le phénomène, notamment en participant aux challenges TikTok. Pourtant, les conséquences sont si considérables que certaines cherchent à tout prix à correspondre aux diktats, quitte à retoucher leurs images et/ou leur corps.
« Se nèg wo k ap mennen, tout nèg kout pase *a*a » !
« Fanm ti tete k ap mennen, tete blayi pase *a*a » !
Si vous avez un compte TikTok, vous connaissez sûrement cette tendance devenue virale sur la plateforme depuis quelques semaines. En fait, TikTok connaît, depuis son lancement, une popularité croissante auprès des jeunes consommateurs. Si elle est réputée pour ses tendances, elle favorise aussi de plus en plus le body shaming. Il s’agit du fait de critiquer, voire blâmer et/ou humilier, quelqu’un pour son physique jugé non conforme aux critères de beauté imposés par la société. Ce phénomène se propage à la fois en ligne et hors-ligne mais elle doit son expansion surtout aux réseaux sociaux.
Dans la sphère privée, des gens reçoivent fréquemment des commentaires négatifs sur leur corps. Au moins une fois de votre vie, des gens, allant de vos proches à de parfaits étrangers, vous diront que vous êtes trop gros, trop mince ou trop court. Par ailleurs, l’anonymat derrière les écrans profite à ceux-là qui ne mâchent pas leurs mots pour critiquer le corps d’autrui. Beaucoup d’internautes émettent des remarques qu’ils n’oseraient pas faire en face. Certes, les hommes sont souvent victimes de stéréotypes mais les femmes demeurent les principales victimes. Ce challenge TikTok en est un bel exemple.
« Vous prenez plaisir à minimiser ou complexer les femmes sans savoir si ces dernières sont complexées par leur corps et si elles ont assez d’estime pour encaisser les critiques », déplore @Belnegesjanelaronde, une tiktokeuse haïtienne suivie par environ 40k followers, dans une vidéo pour réagir face au challenge. « Nous vivons dans une société qui complexe le corps de la femme. Si vous ne répondez pas aux critères de beauté imposés par la société, vous n'êtes pas belles » remarque la féministe. Peau claire, nez pointu, mince, petits seins, pour ne citer que cela. C’est pourquoi Bèlnègès choisit de faire sa vidéo sans soutien-gorge exposant ses gros seins « tombés » dans son maillot. D’ailleurs, elle explique que les gros seins peuvent être causés notamment par l’allaitement ou le surpoids, ce qui est son cas.
Le challenge « fanm ti tete/ fanm kout k ap mennen » montre effectivement comment la société définit les normes de la beauté féminine. De plus, il tend à humilier celles qui n’y sont pas conformes : « fanm kout/fanm gwo tete pase *a*a ». Ce n’est pourtant qu’un cas de body shaming parmi d’autres. Cela n’est pourtant pas sans répercussions. Le culte du corps s’est emparé des réseaux. Et, le body shaming favorise la norme selon laquelle la beauté doit être parfaite. En conséquence, la beauté féminine est exposée, mise en scène et même retouchée. Les photos sont parfois travaillées pour correspondre aux diktats. Quand ce ne sont pas les filtres, des femmes recourent à la chirurgie esthétique. Celles qui ne correspondent pas à ces critères de beauté peuvent s’attendre aux critiques et moqueries.
Le fait est que cette tendance débouche sur un véritable effet de mode. Les influenceurs.ses et les artistes sont omniprésents dans la vie des jeunes internautes tant ils sont scotchés à leurs smartphones. Et, ces personnalités publiques sont nombreuses à s’adonner à la chirurgie esthétique. A titre d’exemple, on peut citer Blondedy Ferdinand et Florence El Luche dont les comptes sont suivis par des milliers de followers. Beaucoup de jeunes filles et jeunes femmes les imitent, du moins celles qui peuvent se le permettre. Qui n’a pas déjà vu des posts de maintes femmes haïtiennes se vanter du travail du célèbre Dr. Patrick ? Ce dernier ayant solutionné leurs « problèmes » corporels. Ce n’est pas tout, elles viennent, pour la plupart, exhiber ensuite leurs corps « refaits » sur leurs réseaux.
En tout cas, ce sont les femmes qui chantent et dansent majoritairement ces sons dégradants, constate également la tiktokeuse. Des semaines avant, cette dernière a publié une vidéo pour parler d’une musique haïtienne qui n’était pas moins différente. Il s’agit de la chanson Ki mele m de Black Fefe, ex chanteur vedette du groupe Brimad. Cette musique remonte à des années et elle a été très virale. Toutefois, le body shaming est encore au rendez-vous. « Apre youn, 2, 3 kat pitit, tete w plat pitit … ». Il est clair que la musique tend à se moquer du corps des femmes dont les seins sont écrasés après une/des grossesse(s). Ce qui pourrait venir s’ajouter à la liste d’insécurités auxquelles sont confrontées les femmes par rapport à leur apparence physique. Est à comprendre que de telles remarques désobligeantes sur le corps peuvent être blessantes et néfastes. Une chose est sûre ! Les séquelles peuvent être graves pour quelqu’un qui n’était déjà pas à l’aise avec son corps. Aux internautes de penser à deux fois avant de contribuer à un tel phénomène aussi divertissant que soit le moyen !
Leila JOSEPH