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Le Programme Humanitarian Parole : un espoir pour les jeunes étudiants haïtiens en quête d'avenir
Depuis déjà plusieurs années, une vague migratoire élevée est constatée en Haïti, causée par la détérioration de la situation sociale et politique du pays, mais surtout par l'insécurité sur laquelle l'État exerce un contrôle ambivalent. Le Programme Humanitarian Parole, communément appelé le "Programme Biden", a offert l'opportunité à des milliers d'Haïtiens de quitter le pays ; une expérience agréable pour beaucoup de jeunes.
Le programme humanitaire parole est un programme instauré par l'actuel président des États-Unis Joseph Robinet Biden Junior, dans le but de régulariser la situation migratoire du pays. Il s'agit d'un programme permettant aux étrangers, plus particulièrement des haïtiens, nicaraguayens, vénézuéliens et cubains de fouler le sol américain avec un statut légal, pour une durée de deux ans maximum.
Selon les plus récentes statistiques, les États-Unis d'Amérique ont accueilli près de 297 000 migrants dans le cadre de ce programme. Soit plus de 112 000 Haïtiens sur plus d'une centaine ayant reçu leurs autorisations. Parmi ces centaines de milliers de personnes, figurent de nombreux jeunes, dont des étudiants, des professionnels entre autres.
De multiples causes expliquent l'affluence des haïtiens vers le programme "parole"
Plusieurs raisons expliquent le fait que les jeunes se ruent vers cette opportunité pour fouler le territoire américain. Interrogés sur les raisons qui les ont encouragés à quitter le pays, des jeunes adultes s'expriment.
Le chômage favorise le départ de jeunes haïtien
"J'ai répondu à toutes les exigences qui m'étaient faites par la société, j'ai été à l'école, fait des études supérieures et tout. Mais je n'ai rien reçu en retour. J'ai bouclé deux études mais je ne suis jamais parvenu à trouver un travail. La partisanerie et la gérontocratie qui règnent dans le pays, ne laissent pas de places aux jeunes pour émerger", explique Edouard, un ancien étudiant de l'université d'État d'Haïti (UEH) qui est actuellement aux Etat-Unis dans le cadre du “Programme Biden”. Le chômage constitue pour Édouard comme beaucoup d'autres bénéficiaires du programme, l'un des motifs qui les ont poussé à quitter le pays.
L'incertitude joue un grand rôle dans le départ massif des jeunes haïtiens
Si pour beaucoup de jeunes, le chômage est un motif suffisant pour partir, pour d'autres, c'est plutôt l'incertitude qui règne sur le pays, affectant ainsi leurs projets, leurs rêves, leurs avenirs. Cette incertitude étant liée aux facteurs sociopolitiques du pays constitue pour beaucoup la raison principale de leur départ. "J'étudiais, mais je n'avais aucun espoir. Je ne voyais pas mon avenir en Haïti" , affirme James, un ancien étudiant de l'INAGHEI. "Me rendre aux États-Unis est pour moi un pas vers l'avant", poursuit-il.
L'insécurité fait fuir les jeunes
Pour Édouard et Tania résidant aux États-Unis depuis respectivement neuf (9) mois et (4) mois, l'insécurité pèse lourd sur la balance. "Face à l'insécurité qu'il y a en Haïti, nul n'est épargné. En ce sens, laisser le pays représente une stratégie de survie."
Un avenir meilleur s'ouvre aux jeunes migrants
Les États-Unis semblent être l’option idéale pour les jeunes haïtiens comparativement à Haïti. Des opportunités qui, chez eux (en Haïti), leurs étaient refusées, sont désormais à leur portée. "Mes attentes de cette expérience n'étaient pas nombreuses. Je pensais uniquement que les Etats-Unis seraient un pays où je pourrais me sentir en sécurité contrairement à Haïti, travailler, évoluer. Et de fait, je n'avais pas tort. Je travaille actuellement, même si ce n'est pas dans mon champ professionnel. Je me fais de l'argent et je peux prendre soin de ma famille et de mes amis qui vivent en Haïti", avance Edouard.
Pour James, c'est presque le même cas de figure. Le jeune de 23 ans dit être heureux et épris de satisfaction d’avoir le pouvoir de subvenir aux besoins de ses parents et de sa fratrie qui sont restés dans le pays.
Les jeunes migrent avec les problèmes du pays
Beaucoup ont quitté le pays à cause de la violence qui y régnait. Toutefois, partir les ont seulement éloigné physiquement de ce problème parce que certains y pensent constamment, et redoutent le moment où une nouvelle désagréable leur parviendrait. "Je ne sais pas comment je réagirais si en me réveillant un matin j'apprenais qu'un de mes amis a été enlevé ou encore qu'un.une de mes ami.e.s a été victime d'un viol, ou pire qu'on a ôté la vie à un de mes camarades", confie Edouard. Ces jeunes que la situation du pays a poussé à partir ont échappé aux potentielles mésaventures qui pourraient leur arriver, mais vivent toujours avec la peur dans le ventre, celle qu'un malheur s'abat sur leurs proches.
La question d'adaptation en terre étrangère
"Durant les premiers mois ce n'était pas facile pour moi, je me posais tout un tas de questions quant à ma place au sein de la société. Je suis rentré aux États-Unis avec un statut de migrant; je ne suis pas chez moi. Tout est différent: autre culture, autres mœurs, autres espaces... Je me sentais tout à fait inconfortable", raconte Edouard. Il poursuit en disant que ses rapports avec ses pairs lui ont permis de ressentir une certaine différence quant à la façon dont il se sentait au début: "Un changement s'est fait remarquer, lorsque j'ai débuté les cours d'anglais. J'ai rencontré d'autres confrères haïtiens et des liens ont été créés. Et j'ai eu l'impression de ne plus être seul".
Si se faire des amis aide Edouard à échapper à une certaine solitude, cela n'exclut pas le fait que la différence entre eux est énorme. "Je me suis fait des amis, il m’a fallu. Toutefois, ce ne sont pas des amis que j'ai moi-même choisi, il s'agit d'amitiés qui se sont imposées à moi en vertu de la situation. Nos centres d'intérêts sont différents, on ne peut pas vraiment discuter, on est tout bonnement différents, il a fallu cependant que je sois tolérant, au risque de n'avoir plus personne", confia-t-il.
L'autre face du programme Humanitarian Parole
En somme, pour le licencié en sociologie, Dorsaint Richardson, cette initiative du gouvernement américain entraîne une forme d'inconscience chez les haïtiens sur les véritables problèmes du pays. Il souligne que chaque compatriote a la ferme certitude qu'il ira aux États-Unis pour atteindre ses objectifs personnels et professionnels. Toutefois, ajoute-t-il, c'est un nombre limité de personnes qui aura la possibilité d'entrer aux États-Unis par l'intermédiaire de ce programme.
Bernard Cayo